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Radeon Série 5700 : AMD attaque Nvidia là où ça fait mal… mais pas sur le ray tracing

Après l’avoir à peine dévoilée, AMD vient de donner tous les détails de sa prochaine gamme de cartes graphiques. Elles sont deux et attaquent frontalement l’offre Nvidia, avec une approche différente mais séduisante… et un prix canon.

Lors du dernier Computex, Lisa Su avait habilement renforcé l’attente autour de sa nouvelle carte graphique en en dévoilant le moins possible. On connaissait son existence, son nom et sa cible, la GeForce RTX 2070 de Nvidia. Restaient de nombreuses questions et quelques espérances – pour n’en citer qu’une, AMD s’attaquerait-il lui aussi au ray tracing via une puce dédiée ?

A l’occasion de l’E3, d’un Tech Day à huis clos puis d’une conférence publique, la patronne d’AMD et ses équipes ont fini de dévoiler ce qu’il fallait savoir sur la première carte Radeon à la fois gravée en 7 nm et basée sur la nouvelle architecture RDNA (pour Radeon DNA).

En définitive, ce sont deux cartes que la société américaine a présentées. Une Radeon RX 5700 XT et une Radeon RX 5700. La première est pensée pour chercher des noises à la Nvidia RTX 2070, donc, tandis que la seconde doit se frotter à la 2060. C’est en tout cas le scénario prévu tant que la société de Jensen Huang n’a pas redistribué les cartes, avec des modèles Ti ou une « Super » carte.

Pour une introduction de nouvelle génération, AMD n’a pas l’outrecuidance d’attaquer les RTX 2080 ou 2080 Ti. Il ne manque pourtant pas d’ambition. Ses cartes sont pensées pour devenir les meilleures offres pour jouer en 1440p. Pourquoi ce créneau ? Parce que selon des études du marché citées par AMD, sept machines de gamers sur dix sont conçues pour jouer en Full HD et datent d’au moins trois ans. Cela signifie que le cycle de mise à jour approche et que la prochaine étape logique est le jeu en 1440p pour le plus grand nombre. Selon AMD, la 4K restera un objectif que seuls les plus acharnés voudront atteindre et pourront s’offrir.

Deux cartes pour introduire une nouvelle architecture multi-plate-forme

Quoi qu’il en soit, ces Radeon RX 5700 reposent sur une nouvelle pile technologique. David Wang, senior vice-président du groupe Radeon Technologies, de retour chez AMD depuis environ un an et demi, indiquait qu’il a fallu « presque quatre ans [aux équipes  d’AMD] pour développer l’architecture RDNA […] qui a été optimisée et conçue pour le jeu, avec un objectif : être partout ».

01net.com – P.F.

En effet, comme Lisa Su, PDG d’AMD, se plaît à le répéter, la stratégie de son groupe est de couvrir tout le spectre des supports de gaming. Du smartphone à la console, en passant par les PC et le Cloud. C’est ce besoin d’omniprésence qui a présidé à la création de cette nouvelle architecture, flexible et adaptable. Un besoin de servir différents produits et donc de propos, qui explique que le calcul parallèle (le fond de commerce des GPU), toujours central, ne soit plus l’unique point de travail.

Pour la société américaine, il faut que le processeur graphique soit également capable d’exécuter de petits calculs, en single thread, avec une latence la plus faible possible, nous expliquait David Wang. Et comme toujours chez AMD, l’objectif est de fournir le meilleur rapport performance par Watt/prix.

Gain de puissance, la force du 7 nm et de RDNA

D’ailleurs, sur la question des performances, AMD est plutôt clair. L’architecture RDNA offre 50% de performances (par Watt) en plus que l’architecture GCN (Graphics Core Next) utilisée ces sept dernières années. Un gain de 50% par rapport à la génération d’architecture précédente pour une même puissance et une même configuration.
En l’occurrence, AMD va jusqu’à détailler les clés de répartition de ce succès. Quasiment 60% revient aux méthodes d’améliorations du traitement des données par cycle.

Ensuite, l’arrivée de la gravure en 7 nm compte pour environ 25% dans ces progrès. Il faut dire qu’une puce qui mesurait 495 mm2, avec GCN en 14 nm (sur une Radeon RX Vega 64, par exemple), n’occupe désormais plus que 251 mm2 avec une puce Navi 10.

Enfin, le reste du gain revient au nouveau design et à la meilleure utilisation de la puissance pour respectivement agencer et alimenter les 10,3 milliards de transistors de la RX 5700 XT.

Evidemment, ces trois piliers jouent en faveur des uns et des autres et AMD n’a clairement pas intérêt à dire que tout le mérite des performances de ses nouvelles cartes revient uniquement au 7 nm. Pour l’instant, il est le premier, mais Nvidia finira bien par y arriver…

Les puces Navi – Navi 10 pour le moment – reposent sur trois grands axes fondateurs. Le premier est l’architecture RDNA donc, qui introduit de nouvelles unités de calcul, un système de cache multi-niveaux et un moteur graphique optimisé pour être 1,5 fois plus performant par cycle d’horloge.

Le deuxième est le nouveau moteur d’affichage des Radeon, qui se distingue de l’ancien grâce à des niveaux de compression innovants et des capacités à gérer les écrans très haute définition HDR. Pour être plus précis, AMD parle en l’occurrence de dalle 4K à 240 Hz ou même 8K à 60 Hz.

D’ailleurs, Asus a annoncé l’arrivée imminente d’un écran de gaming compatible FreeSync 2 HDR qui tirera parti des nouvelles cartes AMD et qui n’aura besoin que d’un seul câble pour transférer les données. Il offre une diagonale de 43 pouces pour une définition de 3840×2160 pixels et un taux de rafraîchissement de 144 Hz. Il se connectera avec un seul câble en DisplayPort 1.4 DSC.

Enfin, le troisième et dernier pillier est le moteur (multi-)média, destiné à faciliter la vie des streamers et à améliorer d’environ 40% l’encodage/décodage des flux vidéo (en VP9, H.264 et H.265, jusqu’en 1080p60, 4K90 ou 8K24).

Une fiche technique très au niveau

Sur le papier, les cartes d’AMD paraissent solides, voici rapidement détaillées les configurations proposées par AMD – celles des partenaires viendront ultérieurement.

Le tableau ci-dessus donne un aperçu rapide des principaux points des configuration des deux cartes. On notera plusieurs éléments. Tout d’abord, le choix de la GDDR6. Le HBM2, plus coûteux, est réservé aux cartes haut de gamme chez AMD. La question du coût, de la montée en puissance et des performances a présidé au choix de ce type de mémoire, nous a expliqué Mike Mantor, Chief GPU architect d’AMD.

Ensuite, la compatibilité avec le PCI Express 4.0, qui ouvre grand la porte à des débits bien supérieurs à la version 3.0 et va permettre de nouveaux usages, immédiats ou presque dans le domaine de la création de contenus et, à moyen terme, dans le domaine vidéoludique.

On relève encore un troisième élément intéressant qui mérite d’être éclairci immédiatement. Là où on trouve généralement deux fréquences pour le processeur graphique, AMD en affiche désormais trois. Les deux habituelles plus une troisième intitulée Fréquence de jeu ou Game Clock, en anglais.

Selon les explications de Laura Smith, Senior Director du Radeon Product Management pour AMD, cette fréquence est une sorte de plancher (non garanti pour des raisons légales évidentes) en dessous duquel le joueur ne devrait jamais voir sa carte descendre en phase de jeu. L’objectif de cette nouvelle indication est de donner une estimation de ce que peut valoir la carte de ce point de vue.

01net.com – P.F. – La Radeon RX 5700 XT, d’AMD, a le bon goût d’être discrète esthétiquement parlant. Son refroidissement à turbine devrait la rendre discrète à l’oreille également.

Enfin, on s’intéresse à la consommation de la carte. Inférieure à ce que les estimations et rumeurs avançaient, elle est assez proche de celle de la concurrence, bien que légèrement supérieure à celle affichée officiellement par les RTX.

Si on fait une rapide comparaison des données dans ce tableau et de celles de la GeForce RTX 2060, on constate que la carte de Nvidia affiche une fréquence de base de 1365 MHz et maximale de 1680. Elle n’embarque par ailleurs que 6 Go de mémoire de GDDR6 et ne bénéficie que d’un bus mémoire de 192 bit.

La GeForce RTX 2070 Founders Edition, celle vendue par Nvidia, est plus proche des configurations des cartes d’AMD. Au niveau de la quantité de mémoire vidéo embarquée notamment et de la largeur de l’interface mémoire.

Difficile d’en tirer des conclusions tant que des tests n’ont pas été réalisés, mais une certitude toutefois, AMD ne joue pas petit bras sur ce point.

Une comparaison avec les cartes de Nvidia 

Comme pour les nouveaux processeurs Ryzen 3000, AMD s’est adonné au jeu des comparaisons de performances entre ces deux cartes et ses adversaires désignées. Evidemment, il faut prendre ces chiffres avec toutes les précautions d’usage.

Ainsi, dans World War Z, avec une définition de 2560 x 1440 en Ultra (on ne sait pas grand-chose des autres réglages), la RX 5700 XT affiche 117 images par seconde tandis que la GeForce RTX 2070 n’en affiche « que » 102. On notera toutefois sur la capture ci-dessous que l’API graphique retenue pour la carte AMD est Vulkan alors que celle de Nvidia utilise DirectX 11.

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Sur ce point AMD a répété à plusieurs occasions que tous les résultats communiqués étaient systématiquement ceux qui étaient les plus favorables aux deux camps, néanmoins, cela fausse un peu la comparaison ou sème un doute compréhensible.

Le créateur de la RX 5700 XT a présenté les résultats comparés d’une dizaine de jeux (Assassin’s Creed Odyssey, Battlefield 5, Call of Duty Black Ops 4, Far Cry New Dawn, Metro Exodus, Shadow the Tomb Raider, etc.). Il semble en ressortir que la nouvelle carte de haut milieu de gamme d’AMD offre des gains de performances de 2 à 22% par rapport à la RTX 2070 quand les réglages des jeux sont poussés au maximum en 1440p.

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De son côté, la RX 5700, opposée à la RTX 2060, dans une phase de jeu dans Apex Legends, avec les réglages au maximum, affichait 88 fps contre 72 pour son adversaire.

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Selon les titres, la RX 5700 affiche un gain en 1440p qui oscille entre 2%, pour Assassin’s Creed Odyssey, par exemple, et peut monter jusqu’à 16 ou 21%, respectivement pour Metro Exodus et Battlefield 5.

Une fois encore, soyons prudents, mais cela semble toutefois indiquer que les cartes d’AMD tiennent la route et pourront être une bonne alternative aux RTX. A une condition seulement que le ray tracing ne soit pas votre marotte et que vous n’envisagiez pas ce mode de rendu comme l’arme à avoir absolument dans votre PC pour les années à venir.

Le ray tracing, pas pour tout de suite…

Nvidia a ouvert le bal et réussi à embarquer quelques-uns des grands studios dans l’aventure ray tracing en temps réel avec accélération matérielle. Il n’y a pas vraiment de doute : cette technologie va devenir un des piliers du jeu vidéo dans les prochaines années. Pourtant, AMD ne monte pas dans le train de suite. Selon lui, il est trop tôt.

AMD

On soupçonne que ce soit parce que les modules de calcul nécessaires ne sont pas encore prêts, mais David Wang donne évidemment une autre explication. Il est d’accord avec Nvidia pour reconnaître que le ray tracing va évoluer d’un rendu par shader à un calcul matériel dédié. Mais, et la temporisation peut être pertinente dans le cadre d’une stratégie globale et multi-supports, AMD veut avant de s’engager sur cette voie s’assurer de « pouvoir adapter le ray tracing aux différents appareils, d’un périphérique local au cloud ».

Il n’y a pas d’urgence pour David Wong qui précise que cette technologie « va prendre quelques années à s’installer vraiment dans le monde du jeu vidéo ». Voilà pourquoi AMD « entend travailler avec ses partenaires pour que l’écosystème soit prêt » du PC au cloud, pour « pouvoir bénéficier du ray tracing partout, tout le temps » a-t-il précisé, pour expliquer la prudence apparente de sa société. Comprenez qu’AMD comptera sur la puissance de ses serveurs dans le cloud pour les calculs de ray tracing en temps réel, pour certains appareils au moins… En attendant, que les impatients ne désespèrent pas, « la prochaine génération RDNA calculera le ray tracing en temps réel », assurait-il.  

L’anti-RTX ?

Puisqu’on parle des absents, notons également que contrairement à Nvidia, AMD n’a pas parlé de l’intelligence artificielle et du rôle envisagé pour ses nouvelles cartes dans ce domaine. David Wang a d’ailleurs expliqué que l’architecture GCN restera d’actualité pour ces calculs spécifiques.

Contrairement à Nvidia, qui mise beaucoup sur les fruits de l’intelligence artificielle pour doper l’affichage de ses cartes, notamment, AMD a dévoilé des technologies « bien humaines », développées de manière classique par ses ingénieurs.

Ainsi, la société a présenté plusieurs fonctions d’amélioration d’image, qui ne seront d’ailleurs pas forcément exclusives aux Radeon RX 5700, puisqu’elles pourront être pour certaines intégrées dans son logiciel compagnon Adrenalin.

Le fabricant de cartes a d’abord présenté Fidelity FX, un ensemble d’outils ouvert aux développeurs qui donnent accès à certaines de ces technologies, comme le Contrast Adaptive Sharpening.

AMD a également introduit le Radeon image sharpening. L’objectif de cette technologie est simple : « faire en sorte que les jeux paraissent plus beaux ». A l’occasion de différentes démos, nous avons pu constater qu’effectivement les zones complexes ou de relief sont plus soignées, le contraste est renforcé, tout en conservant une granularité agréable à l’oeil. Néanmoins, ce n’est pas le jour et la nuit.

Scott Herkelman, CVP du groupe Radeon Technologies, nous a promis qu’une fois habitué, on ne pourra plus s’en passer et faire machine arrière. On veut bien le croire. Une amélioration est toujours bonne à prendre, d’autant qu’elle semble avoir un impact dérisoire sur les performances globales de la carte. Au pire des cas relevés par AMD, cela se chiffre à 1,3% de perte, mais se fixe plus généralement à 0,5%.

Par ailleurs, Scott Herkelman a également présenté une autre nouvelle fonction : Radeon Anti-Lag. Le but en l’occurrence est de réduire le temps de réaction entre votre clic de souris et son effet, par exemple, entre le GPU et l’affichage. Avec la Radeon RX 5700 XT et la fonction activée, le délai tombe à 45,2 ms alors qu’il était à 55,6 ms avec l’Anti-lag désactivé. Evidemment, sur ce point aussi, AMD s’est fait un plaisir de se comparer à Nvidia et sa RTX 2070, qui maintient un délai de 59 ms environ.

« Ce ne sont que 10 ou 15 ms, expliquait le représentant d’AMD, mais c’est la différence entre être le fragueur et le fragué ».

L’ultime argument du prix

Ces deux cartes seront disponibles le 7 juillet prochain, soit le même jour que les nouveaux processeurs Ryzen. Pour ceux qui en veulent plus ou pour les fans de la marque rouge, AMD propose également une déclinaison dopée de la RX 5700 XT pour ses 50 ans d’AMD. Elle sera vendue 499 dollars. Un prix plutôt abordable.

Et c’est justement l’argument du prix qu’AMD avait gardé pour la toute fin. La Radeon RX 5700 XT sera vendue 449 dollars, tandis que sa petite sœur, la RX 5700 sera accessible à 379 dollars.

Pour mémoire, la GeForce RTX 2070, édition Founder, est vendue 599 dollars. Si cela ne vous suffit pas, AMD propose une offre liée. Pour l’achat d’une carte (ou d’un processeur), vous aurez accès à trois mois d’accès gratuit au Xbox Game Pass, en plus de Gears of War 5, lorsqu’il sera disponible à l’été.

AMD vient donc de faire parler la poudre. Il serait très étonnant que Nvidia, archi leader du secteur, ne réagisse pas dans les jours ou heures qui viennent. L’été s’annonce intéressant pour les fans de cartes graphiques ou simplement pour ceux qui veulent mettre à jour leur PC.

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Pierre Fontaine, envoyé spécial à Los Angeles